23/04/2025 2 articles reseauinternational.net  4min #275749

L'implosion du système Doge : comment le plan de Musk pour les fonctionnaires américains s'est effondré

par MoneyRadar

Ce devait être une révolution dans l'administration américaine. Mais trois mois après son lancement en fanfare, l'initiative phare d'Elon Musk pour «réveiller» les fonctionnaires fédéraux s'essouffle déjà, tandis que son architecte prépare discrètement sa sortie.

En février dernier, le milliardaire et Donald Trump ordonnaient à tous les employés fédéraux d'envoyer chaque semaine un email listant leurs cinq principales réalisations. Le message était clair et menaçant : ne pas s'exécuter équivaudrait à une démission.

Mais l'enquête exclusive du Washington Post, s'appuyant sur des documents confidentiels et des entretiens avec 36 cadres et employés de l'administration, révèle une réalité bien différente : dès le début, les hauts responsables ont saboté l'initiative depuis l'intérieur.

La rébellion silencieuse des bureaucrates

À peine deux jours après l'annonce fracassante de Musk, l'Office of Personnel Management (OPM), véritable «DRH du gouvernement», informait discrètement les responsables des ressources humaines que :

  • L'initiative était en fait «volontaire»
  • Le non-respect de la directive ne serait pas considéré comme une démission
  • Aucun plan n'existait pour exploiter les messages soumis

Ce désaveu officieux, mais direct, a créé un patchwork incohérent de politiques à travers le gouvernement. Aujourd'hui, alors que Musk prépare son départ prévu pour fin mai, la confusion règne :

  • L'Agence de Protection de l'Environnement a déclaré fin mars que la tâche serait «encouragée, mais optionnelle»
  • Les Instituts Nationaux de la Santé ont annoncé début avril la fin pure et simple du mandat
  • La Commission des valeurs mobilières (SEC) continue de rappeler régulièrement l'obligation à son personnel, sans préciser comment les informations sont utilisées

Du sérieux au ridicule

Pour les fonctionnaires qui continuent de se plier à l'exercice, les stratégies varient. Certains se contentent de recycler le même texte chaque semaine avec de légères modifications. D'autres tournent délibérément l'initiative en dérision :

«Certains ont commencé à répondre en russe, juste pour embrouiller qui que ce soit - ou quel que soit le programme d'IA, comme aiment plaisanter certains employés - qui examine les messages», confie un employé du département de l'Agriculture.

Un autre fonctionnaire, au département du Logement et du Développement urbain, a choisi la résistance passive : chaque semaine, il utilise ChatGPT pour générer 10 à 20 pages de «salade de mots» avant d'appuyer sur «envoyer».

Un outil de pouvoir désamorcé

Cette initiative reflète pourtant une pratique bien ancrée dans les entreprises dirigées par Musk. Chez Twitter (devenu X), ces emails hebdomadaires servaient d'outils redoutables lors des vagues de licenciements.

«Si des licenciements étaient prévus, ils consultaient ces emails pour voir le travail effectué», explique une source proche du dossier. «C'était un point de données supplémentaire pour justifier le licenciement d'un employé».

Christopher Stanley, l'ingénieur logiciel qui examinait ces emails chez Twitter, a d'ailleurs suivi Musk dans l'administration fédérale. Mais sans stratégie centrale ni directives claires sur l'utilisation des réponses, l'initiative a perdu sa force de frappe.

Un symbole du déclin d'influence de Musk ?

À l'approche de son départ, l'échec de cette initiative emblématique illustre peut-être les limites de l'approche entrepreneuriale appliquée à l'administration.

La Maison-Blanche, qui refuse de commenter le nombre d'agences exigeant encore ces emails, persiste néanmoins à présenter DOGE (Department of Government Efficiency) comme un modèle de transformation rapide des bureaucraties.

«Personne ne peut nier que DOGE a obtenu un succès historique. Les résultats parlent d'eux-mêmes», affirme un haut responsable de la Maison-Blanche.

Reste à savoir si ces résultats survivront au départ de leur principal artisan, alors que l'administration s'enfonce dans une confusion bureaucratique que Musk avait justement promis d'éliminer.

source :  MoneyRadar

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